L’Afrique de l’Est, la Corne de l’Afrique et la région des Grands Lacs abritent 5,46 million de réfugiés et demandeurs d’asile, ainsi que 19,6 million de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays.
Traditionnellement perçues sous un prisme humanitaire, ces communautés sont désormais reconnues comme des acteurs économiques dynamiques au potentiel largement inexploité. Elles contribuent par leurs compétences diversifiées, leur esprit d’entrepreneuriat et leur perspective unique sur les marchés.
Souvent, elles conçoivent des solutions innovantes face aux défis locaux. Leur présence a métamorphosé de nombreuses zones d’accueil en centres économiques actifs, donnant naissance à de nouveaux marchés et à des routes commerciales qui transcendent les frontières nationales.
Des analyses de marché récentes mettent en lumière des opportunités prometteuses. En Ouganda, par exemple, les réfugiés contribuent à hauteur de 3 % au PIB national. Au Kenya, dans le comté de Turkana, leur présence a entraîné une augmentation de 3,4 % de l’emploi global et une hausse de 6 % du revenu par habitant.
Cependant, ces communautés, souvent établies dans des zones reculées et mal desservies, font face à des opportunités économiques limitées et demeurent largement dépendantes de l’aide humanitaire. Bien qu’il existe un consensus croissant sur l’importance de promouvoir des marchés et des entreprises inclusifs pour favoriser le redressement post-conflit, un écart significatif subsiste entre les initiatives visant à améliorer les opportunités économiques pour les femmes réfugiées et rapatriées, et celles qui créent un environnement favorable à la croissance du secteur privé.
Pour répondre à ces défis, la Banque africaine de développement finance un atelier dans le cadre du « Programme régional d’amélioration du climat des investissements pour l’autonomisation économique des femmes réfugiées, rapatriées et des communautés d’accueil », qui cible l’Est de l’Afrique, la Corne de l’Afrique et la région des Grands Lacs.
Le projet est mis en œuvre par le bureau régional du HCR, qui couvre l’Afrique de l’Est, l’Afrique des Grands Lacs et la Corne de l’Afrique.
« Des échanges stimulants ont eu lieu avec les gouvernements, les communautés économiques régionales, les partenaires et les réfugiés eux-mêmes pour accélérer les investissements du secteur privé dans les zones d’accueil des réfugiés. Une forte énergie et une réelle volonté se dégagent pour capitaliser sur les succès, saisir les opportunités et permettre à nos sœurs et frères de contribuer économiquement et de prospérer », a déclaré Mamadou Dian Balde, Directeur régional du HCR, lors d’un atelier de haut niveau sur ce projet, tenu à Nairobi, au Kenya, du 19 au 21 novembre 2024.
L’ONG « Forum pour la Mémoire Vigilante (FMV) », une organisation créée et dirigée par des réfugiés au Rwanda, a été représentée par son Directeur Exécutif, Révérien Gahimbare, Ingénieur civil électromécanicien et Expert en Energies Renouvelables.
Lors de son intervention, M. Gahimbare a présenté l’origine de la création de FMV ainsi que l’expérience de l’organisation dans le domaine humanitaire auprès des réfugiés au Rwanda. Il a détaillé les principaux domaines d’intervention de l’organisation, notamment : l’éducation, la santé, l’énergie et l’environnement, les langues et cultures, la communication, et la protection. Il a également mis en lumière les principales réalisations de FMV dans ces secteurs depuis sa création, avec un accent particulier sur les actions en faveur des réfugiés.
Le Directeur Exécutif a saisi l’occasion pour exprimer sa profonde gratitude envers le gouvernement du Rwanda, qui a accueilli de nombreux réfugiés, qu’ils proviennent des pays de la région ou d’autres régions plus éloignées. Il a salué la mise en place d’un cadre légal permettant aux réfugiés et aux immigrants de créer des organisations nationales, des entreprises, des coopératives et des associations, favorisant ainsi leur auto-développement et leur contribution au développement des communautés d’accueil. Il a également adressé ses remerciements au HCR (UNHCR) pour son soutien technique et ses efforts continus dans le renforcement des capacités de l’organisation. Enfin, il a tenu à remercier chaleureusement les organisateurs de cet important atelier régional.
Révérien Gahimbare a déclaré que l’idée d’un programme régional visant à améliorer le climat d’investissement pour l’autonomisation économique des réfugiés, des rapatriés et des communautés d’accueil était particulièrement pertinente et opportune. Il a rappelé avec conviction que « un réfugié est une personne normale dans une situation anormale ».
Il a formulé une recommandation à l’attention des hautes institutions présentes, soulignant que, compte tenu des réalités, les organisations dirigées par des réfugiés jouent un rôle crucial dans le renforcement de la résilience des communautés vulnérables, y compris les réfugiés, les rapatriés et les déplacés internes. Il a insisté sur l’importance de leur fournir un soutien financier, matériel et technique, notamment par le biais du mentorat et du plaidoyer.
Outre la participation de FMV, des représentants de Tanzanie, du Kenya, d’Éthiopie, de Djibouti, du Rwanda, du Burundi, de la Somalie, du Sud-Soudan et d’Ouganda étaient également présents. Parmi eux figuraient des activistes des communautés d’accueil et de réfugiés, des représentants des gouvernements et des blocs régionaux, ainsi que des acteurs de la société civile et environnementale.
Ce programme, qui couvre 11 pays de la région, est mis en œuvre par le HCR en partenariat avec l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE). Il a pour objectif principal d’identifier et de lever les obstacles juridiques, réglementaires, procéduraux et infrastructurels freinant l’autonomisation économique des communautés de réfugiés et de rapatriés. Le programme vise également à repérer les secteurs offrant un avantage concurrentiel pour l’investissement et le commerce dans les zones accueillant ces populations.
La réunion régionale de haut niveau s’inscrit dans la continuité d’une série d’activités du programme, notamment des missions de cadrage, des consultations communautaires et des dialogues public-privé dans les pays ciblés. Elle constitue une occasion de faire le bilan des progrès réalisés en matière d’inclusion économique et financière des communautés déplacées de force et d’identifier les opportunités pour renforcer le climat d’investissement dans les secteurs stratégiques, tant au niveau national que régional.
Cette réunion vise à exploiter les meilleures pratiques, politiques, partenariats et programmes en collaboration avec les gouvernements, les communautés économiques régionales, les organisations internationales, ainsi que les acteurs du secteur privé et financier. L’objectif est de définir des mesures concrètes pour promouvoir l’inclusion économique et financière des personnes déplacées de force et des communautés d’accueil, en mettant un accent particulier sur l’autonomisation des femmes dans la région.